LES BACCHANTES DE REIMS : RENCONTRE AVEC LE PRÉSIDENT DE L’ASSOCIATION
A l’occasion de la nouvelle course à pied des Bacchantes de Reims, nous avons eu la chance de rencontrer le président de cette association, le Docteur Thomas Ripert. Au lendemain de l’édition 2022 qui a ramené plus de 500 coureurs, le chirurgien urologue nous a partagé ses volontés, l’importance d’en savoir plus sur le cancer de la prostate et le futur de ce projet !
Pouvez-vous vous présenter rapidement ?
Je m’appelle Thomas Ripert, j’ai 42 ans et je suis chirurgien urologue à la clinique de Courlancy à Bezannes depuis plus de 10 ans. Je suis associé au sein du cabinet d’urologie de Bezannes avec 7 urologues et je suis donc le président de l’association des Bacchantes.
D’où vous est venue cette idée de créer cette association contre le cancer de la prostate ? Cela provient-il d’un vécu personnel ou familial ou amical ?
C’est une idée que j’avais en tête depuis très longtemps, bien avant que les Bacchantes Reims existent. A Paris, le projet avait déjà été lancé depuis quelques années (2012). Je n’ai fait qu’extrapoler l’activité de Paris jusqu’à Reims pour créer une nouvelle association locale pour notre ville.
De par ma fonction d’urologue, je suis concerné par le cancer de la prostate. Ma volonté est de faire parler de la maladie localement pour pouvoir véhiculer les informations et récolter des dons dans le but de développer des projets locaux.
Depuis la première édition, 58 000 euros ont été reversés aux urologues de la Polyclinique Courlancy, qu’est-ce que cela vous a permis de faire et de mettre en place concrètement ?
Lorsque nous avons créé l’association en 2016, nous voulions que l’argent soit utilisé pour une cause concrète et locale ! Le projet était d’acheter un appareil d’échographie qui permette de faire des biopsies en fusion d’images dans le cadre du diagnostic du cancer de la prostate et d’utiliser la fusion d’IRM pour faire un diagnostic le plus précis possible !
Cet appareil vaut 110 000 euros ce qui est très cher. L’argent des Bacchantes sert à rembourser l’emprunt fait par les urologues de la clinique pour payer cet appareil. Nous voulions privilégier ce système plutôt que d’attendre que l‘association récupère 110 000 euros pour pouvoir acheter d’emblée l’appareil. Après six éditions, nous n’avons récupéré « que » 60 000 euros ce qui est une très belle somme mais l’avantage est que nous nous sommes donc procurés l’appareil dès 2017, nous avons donc gagné un temps précieux dans la lutte contre le cancer de la prostate.
Pourquoi faut-il expliquer que le dépistage de ce cancer est si important ?
Tout d’abord, il faut savoir que le cancer de la prostate est le premier cancer chez l’homme après 50 ans. C’est plus de 50 000 nouveaux cas tous les ans et plus de 8000 décès par an. Ce n’est pas un cas marginal, ni un cancer exceptionnel, c’est un vrai problème de santé publique. C’est le cancer le plus fréquent chez l’homme depuis plus de 50 ans.
De plus, à l’instar du cancer colorectal ou les cancers féminins comme le cancer du col de l’utérus ou du sein, le cancer de la prostate a besoin qu’on en parle et qu’on porte les informations importantes. Ce qui a très bien marché avec Octobre Rose, on voulait l’extrapoler et faire en sorte que cela fonctionne aussi bien avec le cancer de la prostate.
Nous voulons que tous les hommes, à partir de 50 ans, se disent » j’ai une prostate, je dois y penser, je dois aller voir mon médecin traitant et mettre en place un dépistage individuel.«
C’est d’autant plus important que le cancer de la prostate est ce qu’on appelle « indolent » à un stade débutant. Il n’y aura aucun symptôme, on peut être en pleine forme, courir le marathon de New York et développer un cancer. A ce stade débutant, il ne sera responsable d’aucune symptomatologie, le patient se sent bien et s’il ne rentre pas dans une démarche de dépistage, pour lui il n’aura aucun problème.
Le problème, c’est que le cancer va se développer en silence et lorsque les symptômes vont apparaître, il sera déjà à un stade bien plus avancé où la possibilité de traitement sera déjà beaucoup moins bonne. D’où l’intérêt d’être dépisté tôt et régulièrement.
Monsieur RIPERT, pourquoi une moustache ? Qu’est-ce que cela symbolise pour vous ?
L’origine de tout cela vient du Movember, un mouvement anglo-saxon qui est né en Australie. Cela constitue à se laisser pousser la moustache en soutien aux maladies masculines au mois de Novembre. C’était un beau concept pour démocratiser le sujet !
Il a très bien marché dans le monde anglo-saxon, le mouvement a récolté des millions et des millions d’euros ! Mais en France, cela n’a jamais vraiment été très démocratisé et de ce concept est né « Les Bacchantes » : une sorte de Movember à la française. Le principe d’une course pas sérieuse pour une cause très sérieuse et donc de courir « en moustache ».
Pouvez-vous nous parler de vos partenaires ? Sont-ils nombreux ? Qui sont-ils et comment vous aident-ils dans votre combat ?
Tout d’abord, les Bacchantes sont donc les 7 urologues de Courlancy, moi inclus. Une équipe de bénévoles incroyables qui viennent de tous horizons et qui sont présents depuis déjà longtemps. Ils prennent la forme de patients, du personnel de la clinique, des amis, de la famille, et j’en passe.
Nous avons presque 100 bénévoles qui nous aident le jour de la course et les semaines qui précèdent. C’est aussi une clinique qui nous soutient et met à notre disposition des locaux pour le recueil des dossards qui se fait à la polyclinique des Bleuets et qui prennent aussi en charge l’inscription des coureurs.
Et donc les partenaires ! Des laboratoires pharmaceutiques, le Crédit Agricole, les 3 brasseurs, qui, sont présents le jour de la course, et, nous aident également pour fournir le fameux buffet des Bacchantes qui permet de donner un beau moment de convivialité à l’arrivée de la course ainsi que le Pâté Croûte Piquet qui également nous offre un superbe accueil comme à chaque fois !
La course existe depuis 2012 sur Paris et 2018 à Aix-en-Provence, êtes-vous en contact régulier avec les organisateurs de ces villes ? Avez-vous un projet commun tous ensemble ?
Oui, nous nous connaissons tous très bien. Ceux de Paris viennent régulièrement à Reims car nous avons en commun le fonds de dotation, qui permet de centraliser les choses et une partie des bénéfices que génèrent les associations rémoises, parisiennes ou aixoises, remontent au fonds de dotation pour effectuer des projets plus nationaux.
Ainsi, pendant plusieurs années, nous avons pu former des internes en urologie et mener des thèses sur le cancer de la prostate grâce à des années de recherche et des dons de 20 000 euros pour pouvoir financer un projet de recherche sur différents thèmes du cancer de la prostate.
Est-ce réellement un combat de tous les jours pour vous ?
Forcément ! J’aimerais éviter de me retrouver en consultation devant un patient où on se dit « zut, ce patient-là, on aurait mieux fait de le voir quelques années plus tôt, nous aurions pu diagnostiqué son cancer plus tôt avec des chances de guérison plus épaisse ».
Maintenant, c’est notre rôle au quotidien de gérer, de traiter cela et même à des stades plus avancés, il existe des traitements très efficaces !
Dimanche s’est déroulée une nouvelle édition. L’association « Les Bacchantes a-t-elle d’autres projets à l’avenir ?
Nous sommes à un cap important. Cela fait déjà 6 ans que l’année de Covid a été compliquée et unenédition a malheureusement été annulée (l’édition 2020). Nous sommes sur un nombre d’inscrits en baisse. La question va se poser. Devons-nous continuer sur ce schéma d’une course ? Devons-nous faire quelque chose de différent ? L’objectif est d’avoir toujours le même impact en termes d’informations et de diffusion des bons messages. Si on juge que la course à pied n’est plus le bon schéma, on peut possiblement changer son format.
Après, cela reste une course très conviviale, très appréciée, nous arrivons à bien l’organiser avec tout ce qu’il y autour, la bonne ambiance, le buffet et tout le reste.
Nous avons remarqué que les inscriptions collectives sont en réelle baisse par rapport aux années précédentes. On envisage, pourquoi pas, de démarcher auprès des entreprises pour créer des groupes de coureurs ou créer des conférences pour pouvoir parler du sujet !
Crédit photos : Association Les Bacchantes.
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