COMMENT L’HYGIÈNE SE RÉINVENTE POUR AFFRONTER LES RISQUES DE NOUVELLES PANDÉMIES
Tous les secteurs d’activité ont été impactés par la crise sanitaire de la Covid-19 : santé, agroalimentaire, transports… Dans le monde d’après, innovations et nouvelles technologies vont accompagner l’hygiène du quotidien. Ce qui permettra d’éviter le pire en cas de nouvelle épidémie.
« Pour mettre fin au Covid et prévenir la prochaine pandémie, il faut investir dans l’innovation », écrivaient à quatre mains Bill Gates, fondateur de Microsoft, et Stella Kyriakides, Commissaire européenne à la Santé, en janvier dernier, dans une tribune au Figaro. Et ils avaient raison. Dans le domaine de l’hygiène, ces innovations font désormais partie de notre quotidien, parfois très présentes, souvent invisibles.
Les virucides tout terrain
Les spots télévisuels l’ont suffisamment répété : malgré la décrue de la pandémie, il est nécessaire de continuer de respecter les gestes barrières. Mais la baisse de la contagiosité ne tient pas qu’à nos comportements individuels, elle tient aussi aux objets que nous touchons au quotidien, des emballages plastiques au supermarché aux barres du métro en passant par les panneaux tactiles dans les fastfoods. Dans ce domaine, une entreprise française a très vite marqué des points. Forte de son expérience dans la fabrication de billets de banque, Oberthur Fiduciaire a mis au point la solution virucide Bioguard il y a une quinzaine d’années, solution qui aujourd’hui se généralise à de nombreux supports.
L’idée semble tomber sous le sens : pour éviter les risques de transmission, autant protéger les supports qui nous entourent. « Nos produits sont un moyen non intrusif de renforcer la protection contre la Covid-19 et d’autres virus, explique Nicolas Koutros, directeur général délégué de Bioguard & Co. Bioguard (filiale d’Oberthur Fiduciaire) ne modifie pas les propriétés des objets et surfaces protégés. Une des grandes forces de Bioguard est de pouvoir facilement s’adapter à des surfaces très variées et peut ainsi venir renforcer la confiance des consommateurs et utilisateurs dans de multiples aspects de leur quotidien. » Le producteur français assure que son système permet de faire chuter de 100 à 1000 fois la propagation d’agents infectieux, sans aucun danger pour l’homme ou l’environnement.
Les entreprises françaises innovent, et cette tendance semble se confirmer année après année. Selon Yann Manière, économiste en chef à l’Office européen des brevets (OEB), la France est l’un des rares pays à voir le nombre de ses brevets augmenter depuis 2020, phénomène qui devrait perdurer en 2022 : « Au niveau européen, la France occupe d’ailleurs à chaque fois le top 3 des pays les plus innovants, que ce soit pour les technologies médicales (3e), les produits pharmaceutiques (2e) ou encore les biotechnologies (3e). Cela s’explique par deux facteurs : la hausse des brevets dans le domaine de la santé et un maintien, que l’on ne retrouve pas ailleurs, sur l’innovation dans les transports ». Mais il n’y a pas que les Français qui ont des idées.
Masques et tissus protecteurs, atouts nº1
De l’autre côté de la Manche, des chercheurs de l’Université de Cambridge ont par exemple planché sur l’accessoire nº1 qui s’est imposé partout sur la planète durant deux ans : le masque. Leur objectif : mettre au point une nouvelle technologie de revêtement du tissu des masques, capable de tuer tout type de coronavirus en une heure seulement. Ils l’ont baptisé DioX. Son procédé actif s’attaque à la partie externe du virus et peut même neutraliser tous les variants de la Covid-19. « L’agent antiviral contenu dans le revêtement du masque tue le virus en brisant sa membrane externe protectrice, connue sous le nom d’enveloppe, détaille le Dr Graham Christie, maître de conférences au Département de génie chimique et de biotechnologie de Cambridge. Contrairement à d’autres parties du virus, la membrane reste la même quel que soit le type de mutation. L’attaque contre l’agent pathogène fonctionnera donc sur n’importe quel nouveau variant du coronavirus. » Selon l’équipe britannique, cette solution antivirale à base de sels d’ammonium peut éradiquer 95% du Covid-19 présent sur les masques, et continue d’être efficace dans le temps. Même si, comme chacun sait, l’utilisation d’un masque est censée être unique et limitée dans le temps, elle.
De l’autre côté de l’Atlantique aussi, les scientifiques ont opté pour la recherche de produits capables de neutraliser les virus sur les tissus qui sont, traditionnellement, des nids de microbes. Mais la pandémie a changé la donne. A Salt Lake City (Utah), l’équipe de Sintx Technologies a travaillé sur un biomatériau microscopique capable lui aussi de neutraliser les agents pathogènes comme les virus. Cette fois à base de nitrure de silicium, produit également utilisé dans l’électronique, la céramique de précision ou la chirurgie, et déjà expérimenté contre le staphylocoque à coagulase positive, responsable d’une multitude d’infections. « La découverte de nouvelles propriétés du nitrure de silicium a permis à Sintx de proposer des produits différenciés sur de nouveaux marchés, toujours plus larges », se félicite le Dr Ryan Bock, vice-président de la recherche et du développement chez Sintx. Le directeur d’exploitation de l’entreprise américaine, David O’Brien, souligne que cette avancée est le fruit de treize années de recherche et que l’équipe scientifique approfondit encore son produit nº1 contre le Covid – le Flex-Snap – pour élargir son champ d’application : « Avec la résurgence du Covid et de nouveaux variants, ainsi que d’autres nouvelles menaces pour la santé qui continuent d’apparaître, nous pensons que nos technologies avancées affichent le potentiel nécessaire pour aider une grande partie de la population mondiale, grâce à la simple amélioration de matériaux de base de notre quotidien. »
Objectif maintenant : pouvoir intégrer ces agents antipathogènes directement dans les fibres textiles de nos vêtements.
Des gadgets oui, mais efficaces
Mis à part les agents virucides développés ces dernières années et dont les applications sont de plus en plus larges, de nombreuses entreprises ont aussi planché sur ce qui pourrait apparaître comme des gadgets, mais des gadgets qui sont tout sauf dérisoires. Il s’agit par exemple du bracelet ImmuTouch capable de détecter le mouvement d’approche de notre main vers le visage. L’idée est judicieuse, sachant que les mains sont les principales vectrices de contagion et qu’inconsciemment, nous touchons en moyenne notre visage 23 fois par heure. En Chine, la startup Rokid a pour sa part mis au point des lunettes de protection intégrant des éléments d’intelligence artificielle détectant la température corporelle d’une personne en face de soi.
Une innovation qui trouve par exemple une utilité très concrète dans les aéroports ou dans les lieux publics. Autre technologie déjà utilisée dans le monde médical, les ultraviolets sont désormais à la portée de tout le monde grâce au CoronaOven, mis au point par Log 9 Materials, sorte de caisson dans lequel tout objet déposé sera décontaminé. Même un sac de courses au retour du supermarché.
La pandémie du printemps 2020 avait pris le monde de court. Personne ne s’y attendait, les tergiversations sur les masques chirurgicaux ont symbolisé ce manque de préparation. Aujourd’hui, le bilan de l’épidémie de Covid-19 s’élève à 6,3 millions de morts dans le monde, il n’est donc plus question de laisser le manque d’hygiène constituer un terreau propice à une nouvelle pandémie. Bonne nouvelle, des solutions existent désormais.
Tommy Martinez, contributeur.
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