L’AUTORITÉ ENVIRONNEMENTALE ÉMET DES DOUTES SUR LA RECONVERSION « VERTE » DE GRANDPUITS PAR TOTALENERGIES
Phase indispensable et cruciale du projet de reconversion de la raffinerie de Grandpuits, le rapport de l’Autorité environnementale se montre sceptique sur certains aspects du projet de TotalEnergies. L’industriel va devoir répondre aux questions et aux doutes que suscite un certain manque de précisions, au-delà de la campagne de communication du pétrolier.
Grandpuits a cessé toute activité de raffinage de pétrole en 2021. Elle sert encore de dépôt de carburant pour l’est parisien. Mais TotalEnergies a décidé de reconvertir entièrement le site à la production de biocarburants, destinés en particulier aux avions, en y investissant 500 millions d’euros. On y trouvera toute une série d’activités liées à la production d’énergies renouvelables.
Pour chacune d’elles, le groupe pétrolier a passé accord avec une entreprise au top de l’innovation dans son secteur. Ainsi, dans les bioplastiques, son associé à Grandpuits est le néerlandais Corbion. Et dans le recyclage des plastiques, l’anglais Plastic Energy. Dans la production de biocarburant à base de graisse et d’huiles de cuisson, c’est l’allemand Saria. Et, donc, pour la production d’hydrogène, ce sera le champion français Air Liquide, qui va y investir 130 millions d’euros.
Des associations de défenseurs de l’environnement ont cependant accusé TotalEnergies de pratiquer à Grandpuits, à travers ce projet largement médiatisé, une politique dite de « green washing ».
L’avis de l’Autorité environnementale était d’autant plus attendu. C’est la Mission régionale d’autorité environnementale (Mrae) d’Ile-de-France qui s’en est chargé.
Questions et doutes
Son rapport, rendu le 22 décembre dernier, ne fait pas moins d’une quarantaine de pages. Sans entrer dans le détail, il met surtout le doigt sur le manque d’informations précises sur un certain nombre de points du projet de TotalEnergies. Un comble pour une opération qui a fait l’objet de plusieurs communications détaillées de la société.
La Mrae note ainsi que les futures activités de Grandpuits comportent notamment le recyclage de différents matériaux et effluents, avec des déchets et des rejets à la clé. Faute d’en disposer à l’heure actuelle, elle recommande donc de « réaliser un bilan de l’efficacité des installations de traitement des eaux usées » et de mettre n place un « suivi écologique en Seine des rejets prévus ».
Elle relève également que les particules PM10, c’est-à-dire de 10 microns de diamètre et plus, sont évaluées par le projet, mais pas les PM 2,5, quatre fois plus fines et, selon l’OMS (Organisation mondiale de la santé), bien plus dangereuses pour la santé, car susceptibles de « franchir la barrière pulmonaire et d’entrer dans le sang ». Elle ajoute malicieusement que ses émissaires sur le site ont relevé des traces des pollutions aux hydrocarbures autour de l’usine. Et demande à ce que le phénomène soit « expliqué et réparé ».
Nul doute que TotalEnergies tiendra grand compte des remarques et demandes de l’Autorité environnementale, car si ses avis n’ont pas force de loi, ils sont consultés par les autorités administratives qui délivrent les autorisations. Ainsi que par la justice, lorsqu’elle est saisie, ce qui ne manquera pas d’être le cas à propos du site de Grandpuits.
Crédit photos: Thierry Lebrun- Adobestock.
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