L’EAU COURANTE DE SENLIS CONTAMINÉE PAR DES PESTICIDES
C’est le Roso (Regroupement des organismes de sauvegarde de l’Oise) qui a levé le lièvre, en attaquant devant le tribunal administratif d’Amiens la mairie de Senlis. Les analyses confirmées par l’ARS relèvent un dépassement des taux maximum pour deux molécules, DC et MDC, résidus de la chloridazone. Mais les autorités estiment que l’eau demeure potable.
Jusqu’en janvier 2021, les molécules en question n’étaient pas recherchées lors des contrôles de l’eau dans les réseaux de distribution de la région.
Mais l’ANSES (Agence nationale de sécurité de l’environnement, de la santé et du travail) les a rajoutées. La chloridazone, dont elles proviennent est un herbicide largement utilisé pour la culture des betteraves sucrières… jusqu’à son interdiction en 2020.
Les prélèvements dans les 3 captages de la ville de Senlis révèlent des traces de DC et MDC qui vont nettement au-delà du plafond fixé à 0,1 g par litre d’eau. Le taux mesuré de ces molécules irait en fait de 0,1 à 0,8 g/L, soit huit fois le seuil règlementaire.
Le Roso a saisi le tribunal administratif après avoir demandé en vain à la mairie d’en informer sérieusement la population. Le 11 avril dernier, devant les juges, la municipalité a estimée en avoir assez fait en mettant les analyses en question sur son site et en mentionnant le problème dans une lettre. Mais elle a décidé, sans attendre le résultat du délibéré, de compléter cette information par un article plus détaillé et même des réunions publiques.
L’eau n’est pas « conforme », mais elle est « consommable »
Pour sa défense, la maire de Senlis, Pascaline Loiseleur, fait état d’échanges écrits avec la préfecture de l’Oise et l’ARS (Agence régionale de santé) qui recommandent de continuer à consommer l’eau en question. Elle dit aussi avoir soulevé le problème auprès de Véolia, qui a la distribution en fermage, et être prête à investir pour le résoudre.
L’ARS explique pour sa part que, même au-delà du seuil imposé, la teneur reste assez faible pour ne pas entraîner de risques pour la santé. Elle précise en même temps que les captages vont être contrôlés à nouveau et faire l’objet d’une surveillance renforcée. Bref, l’eau qui coule des robinets ne serait pas « conforme », mais elle demeurerait « consommable ».
Une situation suffisamment ambigüe, voire inquiétante, pour que le Roso ait décidé de remuer le marigot.
Un problème régional
Ceci d’autant plus que le problème ne serait pas seulement local. D’après les informations recueillies par le Roso, la moitié des 350 captages d’eau du département présentent des traces de contamination par les molécules en question.
Au niveau de la région, ce seraient 727 installations, alimentant près de 4 millions de consommateurs, qui présenteraient des teneurs anormales. L’ARS, première concernée, indique qu’un « cadre de gestion de ces molécules, nouvellement recherchées, est en cours d’élaboration au niveau national ». Cela fait pourtant plus d’un an que la question se pose.
Crédit photos: Africa – AdobeStock.
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